Les débuts du Mister Carlo Ancelotti

Les débuts du Mister Carlo Ancelotti

6 mai 2022 5 Par Nicolas Basse

Avant le Milan, Chelsea, le Bayern, le PSG ou encore le Real Madrid, Carlo Ancelotti a fait ses classes en tant qu’assistant des Azzurri, à la Reggiana et à Parme. Retour sur les débuts d’un des meilleurs entraîneurs de l’histoire.


Milieu de terrain de haut niveau ayant évolué à Parme, à la Roma et à l’AC Milan, au point d’être sélectionné à 26 reprises avec l’Italie, Carlo Ancelotti a remporté 3 scudetti et 2 Ligues des champions sur le terrain. Avant de raccrocher les crampons en 1992. Et avant de devenir un entraîneur titré dans les cinq plus grands championnats et multiple vainqueur de la C1, il aura gravi les échelons.


Dans la foulée de sa retraite sportive, Ancelotti rejoint son ancien entraîneur à l’AC Milan Arrigo Sacchi (de 1987 à 1991) sur le banc de l’Italie, en tant qu’adjoint. Rien d’étonnant, puisque dans leur période milanaise, Sacchi avait surnommé Ancelotti son « entraîneur sur le terrain. » Aux côtés du maître, le jeune Carlo, 33 ans, apprend et contribue à la qualification des Azzurri à la Coupe du monde 1994. Une satisfaction, après la non-participation à l’Euro 1992, qui avait valu sa place à Azeglio Vicini, au profit de Sacchi.


L’élève de Sacchi


L’Italie sort difficilement de son groupe, écarte le Nigéria en huitièmes, puis l’Espagne et la Bulgarie. Avant cette terrible finale contre le Brésil, et la séance de tirs-au-but conclue par le raté de Roberto Baggio. Le premier choc d’Ancelotti sur un banc, qui aura apprécié son aventure avec la Nazionale… sans envisager une nouvelle aventure du genre, comme il l’expliquera plus tard : « J’ai vécu l’expérience de la Coupe du monde 1994, c’était spectaculaire, mais je n’entraînerai aucune équipe nationale. Je n’aime pas travailler trois fois par an. »

L’expérience est bénéfique. Dans Mes secrets d’entraîneur, il détaille : « Sacchi m’a fait comprendre comment on motive un groupe, une équipe ou un joueur dans un laps de temps très bref ou au contraire sur la durée. Il m’a inculqué une méthode de travail et appris à la transmettre de façon efficace et claire. »


Débuts sur le banc avec la Reggiana


N’ayant pas encore son diplôme d’entraîneur en poche, il prend en 1995 son premier poste à la Reggiana, tout juste reléguée en Serie B. Sa venue est due à l’audacieux directeur général Franco Dal Cin, bien décidé à vite relancer son club.

En plus du flair quant au profil du coach, ce dernier inaugure la même année en visionnaire le Stadio Giglio, propriété du club et futur Mapei Stadium, désormais également utilisé par Sassuolo. Dal Cin colle Giorgio Ciaschini tuteur d’Ancelotti. Le début d’une longue histoire, puisque Ciaschini accompagnera Carletto à Parme, Turin, à Milan, à Chelsea et au Real.


Presque viré


La direction fait confiance au jeune poulain (36 ans) jusque début octobre, après un terrible 4-1 subi face à Pescara et une inquiétante dernière place, Del Cin annonce à la presse qu’il songe à prendre une décision quant au futur d’Ancelotti. Grâce à une retraite d’équipe et au soutien de ses joueurs, le Mister garde le soutien du président et n’est pas viré.

La Reggiana relève la tête, s’appuyant notamment sur le roublard gardien Marco Ballotta et le prometteur Max Tonetto, et parvient à terminer quatrième en fin de saison. Une place synonyme de remontée immédiate, à une époque où quatre clubs de Serie A descendaient en B.


Direction Parme


Un ancien grand joueur qui brille sur le banc à 36 ans et fait directement remonter une équipe en Serie A, terminant avec la deuxième meilleure défense du championnat, élève d’Arrigo Sacchi, adepte d’un 4-4-2 intransigeant… La performance du coach des Granata ne passe pas du tout inaperçue.

Au point que Carlo signe dès l’été 1996 pour Parme, récent 6e de Serie A avec Nevio Scala. Cela tombe bien, Ancelotti habite à seulement quelques kilomètres et a été formé au club en tant que joueur. Calisto Tanzi, fondateur de l’énorme groupe alimentaire Parmalat et président du club (plus tard jugé pour fraude et association de criminels), veut donner donner les moyens à son équipe d’aller plus haut. Après le refus in extremis de Fabio Capello de reprendre l’équipe, il choisit Ancelotti.

Le mercato est donc XXL. Crespo, Thuram, Chiesa, Stanic, Zé Maria, Bravo, Pedros et le jeune Pietro Strada, ramené dans les valises de Carlo Ancelotti, viennent compléter un effectif déjà très fourni. Parme entame la saison 1996-1997 avec, en plus des recrues : Buffon, Sensini, Fabio Cannavaro ou encore Dino Baggio. Du très solide.


Un 4-4-2 et des sacrifices


Chez les Gialloblù, Ancelotti compte bien imposer son système de jeu : le 4-4-2 avec deux milieux sur les côtés. Une obsession qui lui jouera des tours, au point de refuser… Roberto Baggio. Carlo raconte : « Quand j’étais à Parme, j’avais négocié pour recruter Roberto Baggio. Il me disait qu’il voulait jouer comme milieu offensif, mais pour ce faire, je devais changer mon système, donc je lui ai dit non ».

Autre sacrifié pour l’amour du 4-4-2, le grand Gianfranco Zola : « Un regret tout particulier lors de mon passage à Parme : ne pas avoir mis en valeur tactiquement et techniquement un joueur de la valeur de Gianfranco Zola. » Ancelotti veut le faire rentrer sur le côté droit du milieu, mais les essais et entraînements individuels ne sont pas concluants.


Résultat ? Un départ dès la fin du mercato pour Chelsea. Ancelotti analysera : « J’étais convaincu d’avoir essayé toutes les solutions possibles. Mais il y avait un problème dès le départ. Ne jamais prendre en considération une modification du système de jeu. »


La confirmation


La saison démarre plutôt bien mais entre fin octobre et mi-décembre, Parme enchaîne huit rencontres sans victoire. Le doute s’installe, d’autant plus que Strada et Stanic, les deux milieux de côté titulaires, se blessent. Heureusement, la machine se relance fin décembre, avec une deuxième partie de saison folle : 15 victoires en 21 matches de Serie A. Résultat des courses ? Parme termine deuxième du championnat, à deux points de la Juve, et Carlo Ancelotti s’affirme comme un grand nom.

Parmi les hommes forts de l’exercice, on retrouve le très jeune Gigi Buffon, qui prend vite la place de Luca Bucci aux cages. Mais également Lilian Thuram, s’imposant comme un énorme talent et un roc avec Cannavaro, Dino Baggio qui régale au milieu et le duo d’attaque Chiesa-Crespo, arrivé au mercato. Enrico Chiesa, rapide, technique, vif, tourne autour d’un Hernan Crespo qui découvre l’Europe mais montre rapidement sa qualité de la tête, des deux pieds, et sa grande intelligence tactique.


Dernier tour avant la Juve


La deuxième et dernière saison d’Ancelotti à Parme oscille entre positif et déception. Positif, parce que les Ducali terminent à une sixième place de Serie A derrière la Juve et l’Inter, intouchables, ainsi que la surprise Udinese et les solides AS Roma et Fiorentina. Confirmation, parce que les paris d’Ancelotti ont payé. Buffon s’est installé en patron, la charnière Thuram-Cannavaro assure totalement et le duo Chiesa-Crespo approfondit sa connexion. Déception tout de même, car le club ne se qualifie pas pour la C1 1998-1999 (il gagnera la Coupe UEFA 1999) et ne termine « que » deuxième de son groupe de C1, performance alors insuffisante pour continuer l’aventure.

À Parme, Carlo Ancelotti aura affirmé son style proche de son vestiaire mais aussi beaucoup appris lors de la fin de l’aventure quant à la flexibilité tactique : « J’ai commencé à entraîner en appliquant le 4-4-2, mais face à la réalité du terrain, aux difficultés rencontrées, le temps et l’expérience m’ont conduit à penser qu’un système de jeu est comme un costume taillé sur mesure, avec lequel l’entraîneur doit habiller le groupe de joueurs dont il dispose. »

Après la Reggiana, Ancelotti aura vécu une deuxième expérience fondatrice en Émilie-Romagne. Avant, à l’été 1998, de sauter le pas et rejoindre la Juventus de Turin.


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