Derby d’Italie : place au sport

Derby d’Italie : place au sport

6 avril 2022 1 Par Nicolas Basse

Dimanche 3 avril avait lieu le Derby d’Italie entre la Juventus et l’Inter Milan. Une rencontre majeure pour la fin de saison sur fond de rivalité historique et ravivée sur le plan sportif.



C’est la 244e fois que l’Inter Milan et la Juventus s’affrontaient dans le Derby d’Italie ce weekend. « Derby d’Italie », un terme inventé par le grand journaliste sportif Gianni Brera en 1967 pour désigner cet affrontement majeur, bien que les deux villes soient séparées de plus de 100 kilomètres et ne se situent pas dans la même région (Piémont pour Turin, Lombardie côté Milan).


Une histoire de pénalty


Un affrontement historique entre les deux clubs les plus titrés sur la scène nationale (36 scudetti côté Juve, 19 à l’Inter), les deux grandes viles du Nord de l’Italie, Milan et Turin, et deux familles industrielles à la longue tradition, les Agnelli et les Moratti.

Si la victoire 1-0 de l’Inter Milan a replacé les Nerazzurri dans le course au titre et éloigné la Vieille Dame, la physionomie de la rencontre a, une fois de plus, nourri les débats pendant et après la rencontre. Un seul but, inscrit par l’Inter sur un pénalty. Mais quel but.

Un pénalty accordé après plusieurs minutes de consultation du VAR, un premier tir repoussé par Szczesny mais mis au fond au rebond par un défenseur turinois… avant que l’arbitre ne fasse re-tirer le pénalty par Calhanoglu, à cause d’un De Ligt rentré trop tôt dans la surface. Le deuxième péno fut le bon. L’épisode crispa les deux équipes (comme l’ensemble des spectateurs) pour la suite de la partie et fit évidemment couler beaucoup d’encre.


Hommes clés


Des controverses liées à des fautes, le VAR ou des pénaltys, le Derby d’Italie n’en est pas à son coup d’essai. Mais la rivalité entre les deux mastodontes a repris de l’ampleur. Alors que la Juventus dominait largement la Serie A durant toute la décennie 2010 avec neuf titres pendant que l’Inter peinait à revenir au plus haut niveau, c’est cette dernière qui a mis fin à l’hégémonie noire et blanche en Italie, avec le titre de 2021.


Un scudetto obtenu par les Nerazzurri sous les ordres de… Antonio Conte, légendaire joueur puis entraîneur de la Juve, qui avait remis son ancien club sur la voie du succès en Italie au début des années 2010. Une victoire sans conteste, avec 13 points d’avance sur la Vieille Dame, seulement quatrième.

Les joueurs du titre ? Lukaku, Barella, Young, Sanchez, Martinez ou encore De Vrij. Que des bons coups mercato réalisés par Beppe Marotta. Beppe Marotta ? Directeur sportif de l’Inter depuis 2018, après plus de huit années à la Juventus de Turin, évidemment. De quoi nourrir des regrets côté bianconeri, pour qui les récentes périodes de transferts n’ont pas été des plus réussies.

Si les Juventini ont pu regretter le choix de Conte de rejoindre l’Inter cinq ans après avoir quitté la Juve, voire y déceler une forme de trahison, le départ de Marotta pour l’ennemi aura surtout amplifié la frustration vis-à-vis d’une direction jugée à côté de la plaque.


Dybala, le prochain ?


Direction, encore : la Juventus l’a annoncé, Paulo Dybala, arrivé en 2015, troisième meilleur buteur étranger du club et quintuple champion d’Italie, ne renouvellera pas son contrat en fin d’année et quittera. Un choc pour les fans, quasiment unanimes pour saluer l’apport du gaucher (quand il n’est pas blessé), et quasiment unanimes pour reprocher la gestion du cas de la Joya.

Choc encore : une de ses destinations potentielles ne serait autre que… l’Inter Milan du génie des affaires Beppe Marotta. De quoi ravir les tifosi de la Beneamata et tendre au plus haut point ceux de la Vieille Dame.


Les joueurs passés d’un club à l’autre ne sont pas légion, mais existent. Edgar Davids, Christian Vieri, et, évidemment, le duo Patrick Vieira-Zlatan Ibrahimovic au lendemain du scandale du Calciopoli et de la relégation de la Juventus en Serie B en 2006.


Les origines


Le Calciopoli, qui voit notamment la justice sportive retirer deux titres à la Juventus, 2005 et 2006, dont l’un attribué à l’Inter (l’autre reste non attribué), n’est qu’un épisode de cette rivalité extra-sportive entre les deux entités. Si le duo se partage de nombreux titres nationaux dans les décennies 1930 et 1950, il faut attendre 1961 pour connaître le premier scandale digne de ce nom.

En avril 1961, le stade de la Juventus est trop plein pour la réception de l’Inter. Des tifosi sont massés sur le bord du terrain, certains s’assiéraient même sur le banc adverse, et les Nezarruzzi demandent l’arrêt du match, ce qui finit par être accordé. Victoire sur tapis vert pour l’équipe d’Helenio Herrera dans un premier temps, mais la Juve porte réclamation. En fin de saison, la commission d’appel, indirectement sous l’égide d’Umberto Agnelli, également à la tête de la Juve, décide de faire rejouer le match. L’Inter fulmine, envoie ses jeunes, et se prend un 9-1 en juin. La Juve remporte le scudetto, la dualité est lancée.


Bel avenir


La Juve a dominé la décennie 2010, l’Inter a mis fin au règne. Quelques mois plus tard, les Nerazzurri enfonçaient le clou en dominant la Vecchia Signora en finale de Supercoupe. La lutte pour le titre 2021-22 est plus serrée que jamais, et les deux équipes sont encore dans le coup.

Le face-à-face Juve-Inter a retrouvé les sommets et permet une émulation en haut du football italien, tandis que les aspects extra-sportifs sont, lentement, atténués par le temps. Quel que soit le vainqueur cette saison, la rivalité sportive n’a jamais été aussi relevée depuis des années et promet de belles joutes domestiques. Il faudra que les deux équipes se poussent toujours plus loin. Avec, indirectement, un effet positif sur la puissance européenne des deux clubs ?


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