Les cauchemars d’un supporter de la Fiorentina

Les cauchemars d’un supporter de la Fiorentina

27 janvier 2022 5 Par Nicolas Basse

Les tifosi de la Viola ont une vie compliquée et le transfert de Vlahovic vers la Juve réveille de vieux démons, en cascade.


La Fiorentina n’a plus remporté de titre depuis 2001 (Coppa Italia), terminé la saison en Italie sur le podium depuis 1999 (troisième) ou même connu l’Europe ces cinq dernières années. Pourtant, au-delà de ces considérations de privilégié habitué au haut de tableau, les points assombrissant l’existence des fans de la Fio sont légion, à commencer par une sale rengaine qui gâche de nombreux débuts de nuit.


Les transferts à la Juventus


Réveil en sursaut, consultation frénétique du téléphone avec la recherche : « Dusan Vlahovic transfert ». Non, ce n’est pas un rêve. Vlahovic, 21 ans, déjà 17 buts en 21 matches de Serie A cette saison (au 27 janvier), annoncé comme l’un des plus grands attaquants de la génération à venir, ayant explosé aux yeux du monde à Florence, a rejoint l’ennemi ultime : la Juventus. Au point de susciter des réactions violentes, notamment le déploiement de banderoles insultantes à l’endroit du joueur. Un traumatisme pour les Gigliati qui n’en sont plus à leur première déchirure sur le mercato.

Le drame originel survient avec le transfert de Baggio en 1990, ayant provoqué des scènes d’émeutes, deux jours après la finale de Coupe UEFA remportée par la Vieille Dame… face à la Fio. Il est ré-alimenté dans les années 2010 avec l’arrivée avortée de Berbatov à Florence à cause d’une interférence de la Juve, le départ de Federico Bernardeschi en 2017 pour Turin et, fait d’arme le plus récent des Bianconeri, la signature de Federico Chiesa, formé à la Viola, en provenance directe de la Toscane en 2020. La Fiorentina, fournisseur officiel de talents de la Juventus de Turin.


Le stade


Rendormissement difficile et nouveau cauchemar : la discussion avec un quidam concernant le stade de l’équipe. La rumeur veut que le Artemio Franchi, livré par l’architecte Pier Luigi Nervi en 1931, soit en forme de D en hommage au « Duce » Benito Mussolini. Une fausse information liée au fascisme qui en cache une autre, réelle : son nom d’origine fut Giovanni Berta jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, avant d’être surnommé « Comunale ».

Qui était Giovanni Berta ? Un fasciste florentin tué en 1921 par un groupe communiste et « élevé », après sa mort, au rang de « martyr de la révolution fasciste ». Un poids historique assez lourd, en plus d’afficher depuis des années une pelouse souvent digne d’un terrain vague. Rocco Commisso, président de la Fiorentina, n’a qu’un souhait : le rénover ou pouvoir enfin débloquer son projet de nouvelle enceinte.


La Robben


La nuit se poursuit pour le Florentin, déjà épuisé. Une pensée qui s’oriente vers l’achat d’un canapé d’angle gauche ? Les élections présidentielles ? Le besoin d’un latéral gauche ? Et c’est le fantôme Robben, avec son pied gauche, qui surgit.

C’était il y a plus de dix ans, mais tout supporter de la Fiorentina et suiveur de la Serie A s’en souvient. Huitième de finale retour de la Ligue des champions, à l’Artemio Franchi. La Viola du grand Cesare Prandelli, emmenée par un Jovetic en pleine explosion, orchestrée par un Montolivo encore présenté comme le futur Pirlo et animée en attaque par le duo Vargas-Gilardino, met à mal le Bayern.

3-1 Fiorentina, Gomez, Müller, Ribéry, Schweinsteiger ou encore Lahm sont éliminés. Il reste moins de 30 minutes à jouer, un but qualifierait les Bavarois. Arjen Robben récupère la balle à 35 mètres côté droit, repique dans l’axe, envoie une sacoche de l’espace et violente la lucarne de Frey. Un choc terrible, aussi alimenté par le célébration semi-démente des futurs finalistes (battus par l’Inter Milan).


La faillite


L’aube arrive déjà, et pour se consoler le tifoso repense à l’époque dorée qu’il a connue, ou vécue en décalé, à savoir les années 1990 et le début des années 2000. Une finale de Coupe UEFA, deux Coupes d’Italie, une demi-finale de Coupe des Coupes, les Enrico Chiesa, Dunga, Effenberg, Laudrup, Toldo, Rui Costa, Batistuta…

Des années de bonheur qui se terminent très mal. En 2000 Batistuta est vendu à la Roma, tandis que Rui Costa (Milan) et Toldo (Inter) s’en vont à l’été suivant. 100 millions d’euros de rentrées qui ne suffiront pas à effacer les difficultés financières du club, qui ne parvient plus à verser les salaires de ses joueurs et affiche des dettes de plusieurs dizaines de millions d’euros. Censée être reléguée car 17e, la Viola est interdite de participer à la Serie B. S’en suivent faillite, nouveau départ en Serie C2 et remontée dans l’élite en 2004.


Tout supporter a ses mauvais souvenirs et traine ses traumatismes. Les Florentins n’ont pas le monopole de la souffrance, et peuvent même trouver des motifs d’espoir. Une présidence qui semble ambitieuse, des arrivées prometteuses (Ikoné, Piatek), aucun problème financier en vue. Jusqu’à une nouvelle cicatrice, au moment où ils s’y attendront le moins ?


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