Bruno Neri, le footballeur qui refusa le salut fasciste
Si le football a eu un rôle ambigu pendant la période fasciste en Italie, le joueur Bruno Neri s’est distingué par un geste antifasciste très fort, avant de s’engager contre les nazis, jusqu’à la mort.
L’histoire du football italien, de son développement dans les années 1920 à la Seconde Guerre mondiale, est intimement liée à celle du fascisme. Un Benito Mussolini rapidement convaincu qu’il faut miser sur l’équipe nationale pour asseoir l’image de l’Italie triomphante, de nombreux stades construits, une population incitée à pratiquer le sport, des Azzurri vainqueurs des Coupes du monde 1934 et 1938 avec des saluts fascistes…
La chose est plus que dérangeante mais l’essor du football dans la Botte a été soutenu et accéléré par le fascisme. Heureusement, tout le calcio n’a pas adopté tête baissée ou carrément avec entrain le pas extrémiste. Plusieurs mouvements et personnes ont, à leur manière, protesté.
Castellani, Moretti… Ou encore Neri
Il y a, parmi des dizaines de noms, évidemment celui de Carlo Castellani, joueur d’Empoli ou encore Livourne. Un partisan déporté en 1944 au camp de Mauthausen où il trouva la mort, et dont le nom a été donné au stade d’Empoli.
On pense également à Michele Moretti, joueur de Côme ayant rejoint clandestinement le parti communiste, membre de la résistance et ayant pris part à l’arrestation, la détention et l’exécution de Benito Mussolini en 1945.
Bruno Neri a, lui aussi, un parcours hors du commun. Né en 1910 en Émilie-Romagne, à Faenza, entre Bologne et les plages de Rimini, il intègre l’équipe locale à l’âge de 16 ans. En 1929, il est acheté par la Fiorentina, où il évoluera à la fois latéral droit et milieu de terrain.
Refus du salut romain
La première trace, peut-être la plus connue, de son engagement antifasciste, remonte au 13 septembre 1931. La Fiorentina inaugure devant les autorités son nouveau stade, le « Giovanni Berta » (futur Artemio Franchi), du nom d’un fasciste tué en 1921. Tous les joueurs effectuent le salut romain sauf un, qui maintient ses bras le long du corps : Bruno Neri. Un comportement tout sauf anodin, et qui restera dans l’histoire grâce à une photo parfaitement nette.
Proche des milieux intellectuels, Neri joue sept ans à la Fiorentina avant de rejoindre Lucchese puis le Torino. Son niveau lui vaut trois sélections entre 1936 et 1937, appelé avec les champions du monde en titre par le sélectionneur Vittorio Pozzo.
Passage à la résistance
La Seconde Guerre mondiale va changer le destin d’un Neri en fin de carrière footballistique dès ses 30 ans à cause de soucis physiques. Après l’engagement tardif de l’Italie aux côtés de l’Allemagne, son cousin lui fait rencontrer deux personnalités majeures. Luigi Sturzo, prêtre et personnage politique très important de l’opposition au fascisme, exilé depuis 1924 à Londres, Paris et New-York. Mais aussi Giovanni Gronchi, ancien secrétaire d’État de Mussolini qui participera au redressement de la démocratie italienne après 1945 et deviendra président de la République de 1955 à 1962.
Ces rencontres avec des personnalités qui préparent déjà l’après-fascisme s’avèrent majeures pour son choix, en septembre 1943 lors de l’Armistice italienne (« Armistice de Cassibile »), de s’enrôler dans la résistance : l’Organizzazione resistenza italiana, ou « Ori ».
Tué par les nazis
Vice-commandant du bataillon de Ravenne, son nom de combat est « Berni » et ses principales missions consistent à récupérer des armes et transporter du matériel radio entre les différentes unités de la région. Cependant, son passage à la résistance ne l’empêche pas en mai 1944 de participer au tournoi Alta Italia avec Faenza.
C’est dans l’une de ses missions que Bruno Neri, accompagné du basketteur Vittorio Bellenghi, tombe le 10 juillet 1944 sous les balles nazies, à 33 ans. Il meurt dans l’Apennin tosco-émilien, à l’ermitage de Gamogna, à seulement 20 kilomètres de sa ville natale.
À Faenza, sur sa maison d’enfance, une plaque lui rend hommage : « Voici la maison où naquit Bruno Neri, commandant partisan mort au combat à Gamogna le 10 juillet 1944 après avoir été un grand sportif, qui révéla dans l’action clandestine pendant la guerre de magnifiques vertus de combattant et de guide, un exemple et un avertissement pour les générations futures. »
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