Interview de Romain Molina, partie 2
Après la première partie, suite de l’interview de Romain Molina sur son ouvrage : Cavani, El Matador. Il évoque le rôle de Thiago Motta, ses projets et Trezeguet.
Des personnes citées dans ton livre t’ont-elles fait des retours après lecture ?
Oui, j’ai eu les anciens intendants du PSG qui étaient vraiment ravis. Parce que c’était fidèle. Et eux ils ont vécu ça de l’intérieur. Sinon, les gens que j’ai interviewés n’ont pas encore donné leur avis, notamment pour une question de langue. Je sais que quelques personnes au PSG l’ont lu et l’ont trouvé intéressant, mais quand ça sortira, si ça sort, en Uruguay, je pense que les mecs le liront avec grand plaisir.
Pour toi, c’est important de connaître l’homme pour comprendre le joueur ?
Carrément. Parce que souvent mais pas toujours, une bonne ou une mauvaise forme va être expliquée par ce qu’il y a en dehors. Pour Cavani, l’exemple c’est quand il a 17 ans et que ses parents se séparent. Il enchaîne deux cartons rouges. Donc oui, c’est important. Et pour moi aussi c’est important, parce que je n’ai pas forcément envie d’écrire sur un mec s’il n’a pas un bon fond. Un minimum. Et puis s’intéresser à quelqu’un, c’est s’intéresser aux autres. Aux mecs autour de lui, qui l’ont aidé. Quand tu me parles de connaître l’homme, c’est comprendre le comment du pourquoi des autres personnes autour de lui. Donc c’est une découverte humaine très large.
T’es-tu mis au maté (boisson sud-américaine traditionnelle dont raffole Cavani) ?
Ha non ! Parait-il que la première fois, ça pique toujours un peu. Mais par contre, je pense que si j’ai l’occasion d’aller en Uruguay, ce qui est très probable, je serai obligé de goûter un asado (grillade sud-américaine conviviale, s’apparentant un peu au barbecue), même si je ne suis pas forcément viande rouge. Mais comme Cavani adore pêcher, ça veut dire qu’il y a de bons poissons. Et moi, j’aime le poisson. Et les petits jus de fruit à l’uruguayenne, avec un grand plaisir !
J’ai été impressionné par l’importance de Thiago Motta à Paris qui ressort de ton livre. Pour toi, sa route est tracée ?
Il parle souvent de devenir entraîneur. C’est quelqu’un de très intellectuel, de très intelligent, qui parle de beaucoup de choses et qui s’intéresse aux questions de la vie et de l’être humain. Meunier, Pastore et Edi sont pas mal aussi, lisent un peu, mais Motta se tape des pavés comme Sapiens et les prête ensuite à l’intendant. Un bouquin de 500 pages sur l’histoire de l’Homme. Ça te place le gars. Je pense que Motta, c’est « Le Papa » comme dit Kalifa Traoré, jeune du PSG. On ne se rend pas compte de la qualité du gars. On dit : « Il ralentit le jeu ». Quand il a la balle, c’est celui qui t’accélère le plus le jeu ! Parce que la balle elle circule plus vite que n’importe quel sprinteur. Motta, si il peut jouer en une touche, il joue en une touche hein.
Après, parfois, c’est vrai qu’il est chiant à redoubler les passes avec Verratti. Je peux comprendre. Mais quand il voit un décalage, il le fait instantanément. Il a une vraie pensée de jeu. Quand tu prends le match à Chelsea, avec Zlatan qui se fait expulser, ce n’est pas Laurent Blanc qui fait le discours et replace l’équipe, c’est Le Papa Motta. C’est un mec qui n’a pas de clan dans le vestiaire. Il est dans son rôle et deviendra entraîneur. Il a eu de bons professeurs aussi ! Et quand tu vois la carrière qu’il a fait…
Des fois il a une manière très cynique de jouer, mais c’est toujours réfléchi. Il y a toujours une raison derrière. Pour moi, quand il arrêtera, on se rendra compte de la qualité qu’il a eu. En revanche, il faut souligner qu’il a eu de graves blessures. Il est grand, a des grandes jambes. Du coup, il n’a pas forcément la mobilité suffisante pour certains matchs nécessitant un pressing haut, mais c’est un mec toujours disponible entre les lignes, même lorsqu’il y a un plan anti-Motta. Toujours avec son rythme de sénateur.
Comme quoi le cerveau va plus vite que tout le reste. Quand tu vois ce qu’il est capable de faire dans le vestiaire du PSG dans les moments importants, tu peux avoir confiance. Et il a du tempérament. C’est un des rares qui s’est opposé une fois frontalement à Zlatan. C’est pas le genre qui avalera des couleuvres. Des fois, avec le staff de Laurent Blanc, il disait : « Non, aujourd’hui on ne fait pas ça, mais plutôt ça ».
C’est en Italie que Cavani a le plus progressé et a passé le cap d’homme. Penses-tu qu’il aimerait y retourner ?
Aller en Italie, c’était son rêve depuis gamin ! Quand même ! Il disait : « Je veux aller en Italie ». Sans savoir pourquoi d’ailleurs. Après, c’est vrai que son grand-père est sicilien. Ses enfants vivent à Naples. Avec ça, je te dis tout. Donc évidemment, c’est un pays qu’il aime beaucoup. Pour en avoir parlé avec ses proches, c’est évident. Comme dit son frère : « On mange très très bien à Naples ! ». En Sicile aussi parait-il. Walter (le frère de Cavani) adore la cuisine. C’est sa passion.
Cavani, il a adoré le foot italien. La rencontre de Naples l’a beaucoup marqué. Quand il te dit à quel point il aime Naples, ce n’est pas calculé. Même si son départ a été dur. Il a fait des déclarations mauvaises et maladroites. Et De Laurentis (le président de Naples) a été, comme toujours, très malin. « Le joueur veut l’argent ». Mais De Laurentis est bien content d’avoir l’argent de la clause ! En vrai, les torts sont partagés.
C’est certain que Cavani terminera sa carrière en Uruguay. S’il sent qu’il a encore des jambes pour jouer en Europe, peut-être qu’il retournera en Italie. Même si je pense que tenter l’Espagne peut l’intéresser. Mais l’Italie, ça dépendra de sa situation familiale et de sa forme. En tout cas, je le vois finir à Salto, en Uruguay, après être passé par Danubio et tenter une Copa Libertadores, ce qui parait-il le fait bander. (Pour en savoir plus sur le football en Amérique du Sud, rendez-vous sur Lucarne Opposée. La référence).
Parenthèse Amérique du Sud. Trezeguet est mon amour assumé. Que penses-tu de lui ?
Il m’a fait vibrer. Tu vois, c’est De Sanctis qui disait ça. Il parlait de Trezeguet et il le trouvait fascinant. Il disait : « Les grands buteurs, on dit putain, il a de la chance. Mais non, ce n’est pas de la chance. Il sait. Tu ne peux pas l’expliquer, mais il sait où va arriver le ballon ». Et Trezeguet je trouvais ça exceptionnel. Un style comparable à nul autre. Il sentait le foot. Donc grand amoureux de ce genre de joueur, avec une personnalité rare. Il a réussi en étant lui-même !
Beaucoup de respect. Ça, c’est un 9. Et le 9 est spécial. Quand il ne marque pas, il n’est pas content. Faut pas lui faire une blague sous la douche après le match ! Cavani, pareil. Il a la violence et l’égoïsme du buteur et dans la surface… Se créer autant d’occasions et savoir aussi bien se placer, c’est un talent. Que très peu de personnes ont. Trezeguet, techniquement, c’était pas la folie hein. Mais par contre le jeu de tête, la technique de frappe, la prise d’information vis-à-vis des adversaires ET du gardien, et bah bonne chance pour me trouver des mecs meilleurs que lui durant les 25 dernières années. Incroyable. Et quand tu repenses à sa doublette avec Del Piero… Aie aie aie. Et Marcelo Zalayeta ! Ha ha ha.
Comptes-tu envoyer le livre à Pierre Menès ?
Parait-il qu’il dit un peu de bien de Cavani ces derniers temps. Je ne vais pas lui envoyer, parce que je suis très ami avec Ambre de son émission, mais j’espère qu’elle lui dira de l’acheter ! Ce n’est que 17€. Il faudra qu’il mette 10 centimes de plus… (Que son livre coûtant 16,90€).
C’est quoi ton projet de roman ?
Zamora. J’en ai déjà écrit un bon paquet. C’est une histoire sur les bandoleros andalous. Zamora, c’est un peu le dernier, moderne. C’est pas une histoire de drogues, c’est plus profond. Des fois je me surprends et j’ai l’impression de faire de la littérature érotique… J’en suis à plusieurs chapitres. Zamora est une sorte de légende urbaine. Il a un espèce de supérette dans le centre de Malaga et son adjointe, une vieille dame qui fabrique des merveilleuses contrefaçons de billets, il ne s’en méfie pas. Malheureusement, un jour, son mari est retrouvé mort avec une paire de ciseaux dans la poitrine. Son « bon à rien de mari » comme elle dit. Zamora arrive et lui dit « Ne t’inquiète pas, je connais des amis fermiers, les cochons ça mange de tout »…
Il y a aussi un Russe qui vient d’un gang à tatouages, qui a fait de la prison… Zamora fait le bandolero pour survivre. Un justicier des temps modernes, avec Linda, son amante écossaise. Et il a retrouvé dans les archives de son grand-père un message dans une ancienne langue, qu’il n’arrive pas à traduire. Une personne peut l’aider, donc il essaie de la retrouver pour comprendre ce papier. Je pense que c’est une aventure imaginative qui va surprendre, donc on va croiser les doigts pour espérer qu’il soit publié ! Ça ne parle pas de foot mais ça me ressemble.