Paroles de supporters #4 : « Je calque ma vie en fonction du club »
Parce que certains vivent pour leur club et/ou parcourent des milliers de kilomètres pour soutenir leur équipe, il était important de donner la parole aux acteurs les plus importants du football. Épisode 4 de « Paroles de supporters » avec Nicolas, tifoso de l’AC Milan.
Depuis quand es-tu supporter de l’AC Milan ?
C’est une longue histoire. J’ai déménagé en Italie à l’âge de 5 ans (en 1999) et mon premier match à San Siro était un du Milan AC. J’habitais à 500 mètres du stade. Ensuite, je suis parti vivre en banlieue de Milan, dans la même résidence que le troisième gardien de l’époque, Valerio Fiori. J’ai tout de suite sympathisé avec lui et ses enfants et du coup la passion n’a fait que grandir.
Quand as-tu été au stade pour la première fois ?
Mon premier match au stade fut un AC Milan – PSG en phase de poule de ligue des champions. Le 14 février 2001 avec des buts de Leonardo et Anelka. Un sacré souvenir !
Vas-tu souvent à San Siro ?
Quand j’étais en Italie, j’allais voir quasiment tous les matches à San Siro. Ensuite je suis revenu vivre en France en 2008 et depuis je me déplace très régulièrement au stade. Je suis d’ailleurs toujours abonné en Curva Sud. J’essaie de faire environ une dizaine de matches dans la saison.
Suis-tu les équipes de jeunes ?
Effectivement en Italie c’est dans la culture que de suivre l’équipe des jeunes. Je regarde dès que possible leur match et leur résultat tous les week-end. C’est toujours intéressant de voir le futur évoluer et on se rend compte assez rapidement de qui a le niveau pour monter en équipe une. Je me rappelle, quand j’allais à Milanello voir les entrainements, celui des jeunes était toujours visible au public et je peux dire que Cutrone faisait déjà forte impression. Idem pour Donnarumma ou encore Locatelli.
Appartiens-tu à un groupe de supporters ?
Je n’appartiens pas à un groupe en particulier. En revanche je vais voir les matches uniquement en Curva Sud, là où je suis abonné. Aujourd’hui je ne me verrais pas vivre le match dans un autre endroit du stade. L’ambiance est tellement particulière et j’ai besoin de vivre le match à fond, comme si j’étais sur le terrain. Si je finis sans voix, c’est que c’était un gros match ! Je fais généralement les déplacements à plusieurs et notamment avec des gens que j’ai connus sur Twitter. C’est toujours un bonheur de voir qu’on partage tous cette même passion.
Arrives-tu à conjuguer ta vie avec cette passion ?
C’est toujours le plus difficile, surtout au niveau professionnel. Je bosse dans le commerce et du coup le samedi aussi. Tout est une question d’organisation et je m’en sors plutôt bien. Je calque tout simplement mon agenda en fonction des horaires des matches. Heureusement on joue rarement le samedi après-midi.
J’ai le lundi comme jour de repos fixe ce qui me permet de me déplacer pour voir les matches le dimanche. Pour ma vie privée c’est assez simple, toute ma famille sait que le Milan passe avant tout donc je ne loupe pas un match ! Ma copine aime beaucoup regarder les matches donc c’est aussi un avantage.
Que penses-tu du « projet milanais » ?
C’est une question assez complexe car il y a beaucoup de parts d’ombre dans cette longue histoire de rachat du club. La première chose, qui est très claire, c’est que le Milan ne pouvait pas continuer sous la gestion de Silvio Berlusconi. La vente était donc inévitable. Il est encore tôt pour tirer des conclusions. Ma seule crainte c’est de voir si le projet dure sur le moyen-long terme.
On verra la suite. Si on parle sportif, il y a vraiment eu des erreurs de Mirabelli. Notre ligne d’attaque est à revoir ainsi que le milieu de terrain. Depenser 65 plaques pour Kalinic et Silva c’était pas la bonne équation. Après je pense que 3-4 gros coups suffiront à faire monter en puissance l’effectif. Mais il faut de la qualité. L’année dernière on a fait de la quantité, la il faut y apporter la qualité. Et sur la situation extra sportive on est toujours dans le flou c’est clair, mais rien d’alarmant à mon goût.
Berlusconi t’inspire quoi ?
Que dire, à part que c’était le plus grand président possible. Il a amené le Milan sur le toit du monde à l’image de toute sa carrière et de sa vie. Une éternelle reconnaissance envers lui mais il était temps de passer la main.
Un avis sur le recrutement estival ?
Cet été j’aurais adopté la même stratégie que les dirigeants, c’est-à-dire de tout changer ou presque. Quand on regarde l’effectif de l’année dernière, ça faisait peur mis à part Bonaventura, Donnarumma, Locatelli, Romagnoli, Suso. Il fallait donc un changement radical. Ce qui implique aussi du temps pour construire un groupe. Après sur les opérations en elles-mêmes, évidement qu’il y aura des ratés, on ne peut pas prendre 11 joueurs et ne pas se louper sur un ou deux éléments. Ce changement pouvait paraitre brutal mais il était nécessaire. Le groupe est pour moi incomplet mais de qualité. La seule erreur fut de recruter sans vraiment réfléchir à un schéma fixe. Par exemple, tu prends Bonucci pour passer à 3 derrière mais du coup tu sacrifiais des hommes comme Calhanoglu ou Suso. A chaque fois que tu changeais de système, tu devais sacrifier un ou deux éléments. Ce qui montre le côté un peu bancal du recrutement sur cet aspect-là.
Jamais eu de baisse d’amour ?
Jamais. Le Milan AC c’est mon club, le club de ma vie. Et je crois même que les années de galère n’ont fait que renforcer mon sentiment d’appartenance.
Montella, tu en penses quoi ?
Je ne veux plus jamais entendre parler de Vincenzo Montella ! Blague à part, oui le changement était inévitable. Il a eu 90% de l’effectif très tôt pour préparer la saison et tu as l’impression qu’à Milanello c’était les vacances. C’était à se demander ce que les mecs faisaient durant la semaine. Aucun plan de jeu, aucune équipe type et une condition physique pitoyable. De plus il n’a jamais réussi à créer un groupe, ce qui est la base de tout.
Et c’est d’ailleurs ce que j’attendais principalement de Gattuso. Il est en train de réaliser ça et on voit directement les résultats. Sentiment d’appartenance, groupe, condition physique sont les bases pour bien repartir. Gattuso apporte et on verra ce que cela va donner sur la fin de la saison.
Et Gattuso ?
Pour moi il incarne le Milan à l’état pur. Il fait du bien à l’environnement et aux supporters. Il y a eu un vrai impact sur les joueurs également. Après à mon goût la prolongation de contrat est prématurée. J’aurais attendu la fin de saison sincèrement. Je reste convaincu qu’il faut un coach confirmé pour ce type de projet mais j’espère me tromper car j’ai vraiment envie de renaître avec Gattuso.
Pour toi, c’est quoi l’Inter ?
Pour l’inter c’est tout simplement l’ennemi numéro un. Je hais ce club, je hais ses couleurs. C’est vraiment le rival dans toute sa splendeur et le derby est pour moi le match le plus important de la saison. Sans aucun doute. Mais dans le fond, heureusement qu’ils existent pour qu’on puisse rigoler un peu !
Quel est ton meilleur souvenir lié à Milan ? Et le pire ?
Le meilleur souvenir c’est pour moi la Ligue des Champions en 2007. En 2003 j’ai de beaux souvenirs mais j’étais plus jeune. En 2007 j’ai pu la vivre à fond. Et puis c’était la revanche de cette nuit qui n’a jamais existé à Istanbul. Istanbul c’est d’ailleurs mon pire souvenir (défaite en finale contre Liverpool, aux tirs aux buts, après avoir mené 3-0), je sais je ne suis pas très original. Mais quel traumatisme. J’en fais encore des cauchemars je peux te l’assurer.
J’ai aussi un souvenir marquant c’est le match en 2004 Milan Brescia où l’on fête le Scudetto. C’était le dernier match de Baggio et j’étais dans les tribunes. Un souvenir fantastique.
Tu dirais que l’AC Milan représente quoi pour toi ?
Pour moi l’AC Milan c’est tout. C’est au-delà de la passion. Je vie véritablement et je calque ma vie en fonction du club. La semaine je n’attends qu’une chose, le match du Milan et peu importe la situation du club. Il a également une grosse valeur car il représente mes années vécues en Italie, un pays qui m’a accueilli et qui est devenu ma deuxième maison. Comme on dit en Italie « Forza Milan, finché morte non ci separi » (Jusqu’à ce que la mort nous sépare).